Les logiciels libres sont bien meilleurs pour l’environnement… mais pas que !

Un rapport intitulé « Apports du logiciel libre à la durabilité des équipements (smartphones, ordinateurs, objets connectés, périphériques) : une synthèse » a été publié en janvier 2023 par Pierre-Yves Gibello de l’organisation OW2, sous licence Creative Commons BY-SA. Il mérite toute notre attention.

Voici le résumé de cet article pour vous mettre l’eau à la bouche :

gnulinux

La durabilité du matériel dépasse généralement celle du logiciel, dont la dynamique de renouvellement rend vite obsolètes les précédentes versions : certains matériels peuvent même devenir inutilisables, faute de logiciel permettant leur exploitation. Cette dynamique est parfois aggravée par des pratiques délibérées d’obsolescence programmée, mais existe même en leur absence.

Les matériels que l’on peut faire fonctionner avec du logiciel libre permettent de combler cette lacune, des développeurs tiers pouvant fournir des logiciels alternatifs permettant d’exploiter le matériel jusqu’au bout de son existence physique.

Ces logiciels libres font généralement l’objet de support professionnel ou d’offres commerciales packagées avec du matériel, et constituent donc une filière économique, que vient renforcer l’économie sociale et solidaire (ESS), très active dans le réemploi de matériel.

Le logiciel libre est donc un facteur d’accroissement de durabilité du matériel, mais également de durabilité au sens écologique (impact réduit) et économique (filières en croissance intensives en emploi local, par synergie entreprises / ESS / collectivités).

L’article démontre ainsi que les logiciels libres représentent une solution d’une part pour prolonger la durée de vie d’appareils, mais ils jouent également un rôle prépondérant pour lutter contre l’obsolescence programmée, en sortant des logiques consuméristes de beaucoup d’entreprises du secteur.

Le lien avec les acteurs de l’ESS est également souligné dans l’article :

La possibilité d’installer un système libre (open source) est un élément clé de durabilité : d’autant qu’une offre commerciale de support est souvent proposée par des acteurs de l’ESS (filière de réemploi des matériels) ou des entreprises, avec un impact durable sur de l’emploi local.

On peut cependant noter dans la conclusion une phrase étonnante :

Pour survivre aux menaces qu’elle s’est elle-même créées, l’humanité doit se doter de technologies répondant au strict besoin et pensées dans une approche durable. Les logiciels open source répondent naturellement à ces objectifs, sans tomber dans une logique de décroissance et de régression.

« Sans tomber dans une logique de décroissance ». C’est un réflexe assez classique dans ce type d’argumentation. Il faut rassurer avant tout ! Mais pourquoi donc ? Parce que nous vivons dans une société qui a élevé la croissance comme vertu cardinale, comme socle inébranlable qu’on ne peut surtout pas remettre en cause. Renoncer à la croissance, c’est se lancer dans le vide, parce que toute notre économie est basée dessus.

Or, et ce n’est pas un scoop, la croissance matérielle perpétuelle n’est physiquement pas possible dans un monde fini. Nous pourrions préférer la formulation suivante :

Les logiciels libres permettent justement de mettre en place des actions nécessaires de sobriété numérique et de favoriser l’économie sociale et solidaire, fonctionnant le plus souvent à but non lucratif. Ceci permet de réduire fortement notre consommation matérielle tout en garantissant la dignité humaine et un développement soutenable de nos activités.

Source : https://man.sr.ht/~etalab/logiciels-libres/docs/2023_01_RapportIndiceDurabilite.pdf