Crypto AG, capitalisme de surveillance et environnement

La RTS accueillait le lundi 17 février dernier dans sa matinale, Solange Ghernaouti, professeure en cyber-sécurité à l’Université de Lausanne. L’affaire Crypto AG était bien sûr le déclencheur de cet interview. Les propos se sont cependant très rapidement orientés vers d’autres sujets expliquant ce phénomène, mais de manière plus large.

Solange Ghernaouti est une spécialiste du domaine dotée d’une compréhension acérée des problèmes actuels engendrés par les dérives du numérique. De plus, elle donne clairement son avis, souvent en décalage avec les discours tenus par nos élites, mais toujours étayé par des arguments factuels et scientifiques, ce qui est assez rare et précieux.

 

Le numérique se complexifie et se globalise. Il devient ainsi extrêmement difficile de maîtriser toute la chaîne technologique, ce qui implique une perte de confiance. Dans chaque couche technologique, il peut ainsi y avoir une porte dérobée ou une faille de sécurité connue et exploitée par différents acteurs, et ce, dans la plus grande opacité.

La question du lien de confiance va de pair avec la transparence et la liberté. Les entreprises technologiques doivent ainsi démontrer que leurs systèmes respectent leurs usagers. On peut bien sûr évoquer les logiciels libres qui permettent cette transparence et peuvent contribuer à restaurer ce lien de confiance. Mais comme les systèmes se complexifient toujours plus, la seule transparence ne suffit plus. Nous devons ainsi militer pour relocaliser les services numériques et de facto réduire le niveau de complexité, notamment par ce qu’on appelle le low-tech, ou basse technologie (en opposition au hi-tech, très complexe, fragile et très consommateur en ressources).

Solange Ghernaouti évoque également la question de la 5G et sépare à juste titre la problématique en trois axes :

  • A-t-on besoin de cette technologie ou ne sert-elle finalement que les intérêts des industriels pour poursuivre leur logique économique de croissance ?
  • Sommes-nous certains que cette technologie est inoffensive pour l’être humain et pour la biodiversité ? Ne doit-on pas justement faire preuve de prudence et invoquer le principe de précaution ?
  • Connaissons-nous les enjeux politique de cette technologie qui renforce certains acteurs dans leur domination des flux informationnels ?

Enfin, Solange Ghernaouti établit un lien entre le numérique, la surveillance mondialisée, le modèle économique dominant et les défis environnementaux auxquels nous devons faire face maintenant (et pas en 2050).